AccueilMars 1917, le repli allemandBienvenue sur le site de l’ARHL « Mars 1917, le repli allemand et la destruction
de nos villages – entre Péronne
et Saint-Quentin » réalisée
en Mars 2017 par l’Association pour la Recherche sur l’Histoire Locale en
partenariat avec la Communauté de Communes de la Haute-Somme. Vous pourrez lire, (voir le menu), quelques pages du livre de Jacques Coquelle*, « La mémoire de
Vermand » (Tome II – publié en 1989). Ces pages se rapportent à la période
du repli allemand à VERMAND et dans ses environs. Ce livre étant épuisé, l’auteur nous a
autorisé à présenter ces pages sur notre site. Qu’il en soit remercié ! *Jacques
COQUELLE : ancien journaliste, historien, Prix d’Histoire de l’Académie
française, auteur de « La mémoire de Vermand » en deux tomes (1985 et
1989) et « Livre d’or, livre de larmes – Vermand à travers les
guerres » en 2014. les recherches relatives aux Historiques
des régiments allemands ont été effectuées – en préparation de l’exposition - par
Gerd KRUMEICH, Professeur émérite de l’Université de Düsseldorf et
Vice-Président du Centre international de recherche de l’Historial de la Grande
Guerre. Nous le remercions vivement pour sa
confiance, sa cordialité et pour l’apport inespéré que sa contribution a
constitué dans la préparation de cette
exposition. Il nous a ainsi soutenu dans notre recherche d’une meilleure
connaissance de ce qui s’est déroulé sur notre territoire de l’Est de la Somme
en Février-Mars 1917 et dans les mois qui ont précédé. Opération "Alberich"
- Chronologie générale
„Alberich » fut le nom de code pour la préparation,
durant l´hiver 1916/1917, de la retraite du « groupe d´armées Kronprinz
Rupprecht » qui englobe les 6e, 1ere, 2de et 7e
armées allemandes. Début septembre
1916 : le groupe d’armées Kronprinz Rupprecht reçoit l’ordre, par
le Grand
Quartier Général de Ludendorff, de chercher une ligne par l’arrière (vers Arras – à l’ouest de Cambrai – St.
Quentin – à l’ouest de Laon) sur laquelle les troupes pouvaient se retirer pour économiser des hommes et du matériel (
future ligne Siegfried/Hindenburg). 2 octobre 1916 :
ordre du GQG, signé Ludendorff, de commencer les préparations. On y dit qu´il
faut surtout que l’ennemi ne trouve aucun matériel de guerre utile et que le
pays serait à détruire d´une façon systématique. « L´ennemi doit trouver
devant lui un paysage complètement défriché dans lequel ses possibilités de
mouvement sont rendus difficiles dans la mesure du possible » On y dit
aussi que toutes les mesures doivent être planifiées jusqu´au 10 novembre. 14 novembre :
le QG de la 2e armée instruit ses divisions sur les dimensions des
destructions planifiées et donne l’ordre de préparer les ponts et routes à
faire sauter On planifie aussi la destruction des villages qui doit être faite de manière à garantir le
bon transport en arrière des troupes. Ainsi les villes de Ham, Vermand, Nesle,
Noyon sont épargnées. On veut « laisser à l’ennemi » la
population dans des villes et villages vidés. 16 décembre :
le GQG demande au groupe d´armées pourquoi on n´ rien fait encore. Il faut se
dépêcher surtout pour le planning de l’évacuation de la population. Mais
Rupprecht, chef du groupe d´armées, rechigne et répond même, le 15 décembre
qu´il n´a nullement le projet de faire le retrait vers la ligne Siegfried. Il reçoit un ordre formel par Ludendorff, le
16 décembre, de procéder enfin à ces préparations Le 31 décembre :
Ludendorff répète cet ordre puisque Rupprecht n´a rien fait encore ! Comme
il le dit dans son « Journal » il trouve ce repli inutile et veut
éviter trop de dégâts pour la population. Le 4 fevrier 1917 :
Le GQG donne l’ordre de commencer la retraite. Cette fois, Rupprecht s´incline
et donne l’ordre à ses armées de commencer les travaux de destruction
« Alberich » le 9 février. Le 16 mars,
le repli des troupes commence. Sources : article Michael Geyer in: Hirschfeld/Krumeich/Renz, Die Deutschen an der Somme (2016) Et: „Befehlsgebung für die Alberich-Sperrungen, in: Vierteljahreshefte für Pioniere, , mai 1935, p. 71 – 75.
FÉVRIER
1917 – «TRAVAUX» et DESTRUCTIONS à PÉRONNE À
partir du 1er
février 1917 le régiment est en
positon à PÉRONNE et il y reste
jusqu’au 20 ou 21 février avant d´être transporté vers Wassigny. L’historique
du régiment indique,
avec fierté : Et
puis : « Situation
générale : Les positions particulièrement exposées vers l’ennemi entre
Arras et le Chemin des Dames ont été reconduites sur la ligne Siegfried*, qui fut
construite durant l´hiver. Ainsi, on a réussi à empêcher une nouvelle offensive
franco-britannique dans cette région. » L’historique
décrit ensuite « ce qu´on fit de grandiose dans la position
Siegfried ». On
a fait échouer le planning allié d´offensives majeures. *La Ligne
Siegfried est le nom donné par les Allemands à leur nouvelle ligne
défensive construite durant l’hiver 1916-1917 - notamment entre Cambrai et
Saint-Quentin - sur laquelle ils se replient en mars 1917. Cette nouvelle ligne
défensive des Allemands est appelée par les Alliés : Ligne Hindenburg,
du nom du chef du Grand-État-Major des armées allemandes.
Péronne, telle que trouvée par les Britanniques lors de leur entrée dans la ville le 18 mars 1917, suite aux bombardements alliés (Bataille de la Somme) et aux destructions systématiques par les troupes allemandes avant leur repli sur la ligne Siegfried / Hindenburg.
FEVRIER 1917 - LES DESTRUCTIONS aux alentours d’ETREILLERS
Informations
extraites de l’historique du régiment
allemand cité en bas de page :
C´est
un bataillon du Génie, qui est à
part entière engagé dans les destructions de l’Opération Alberich. Son
historique constate, pour commencer, qu’il a fallu se retirer sur la ligne
Siegfried pour résister à l’offensive planifiée par les alliés. Il
indique également que les Allemands savaient que ces destructions
systématiques, nécessaires pour résister, seraient l’objet de la propagande
ennemie…(les Alliés considérant que les
Allemands battaient en retraite, par faiblesse, devant leur pression
constante). Les
lieux des 1ères destructions effectuées par ce régiment furent ETREILLERS, ROUPY et DOUCHY. En
premier lieu, il a fallu abattre les cheminées des usines ainsi que les arbres
sur les chaussées, dans la partie sud de la forêt d’HOLNON et dans le parc du Château de Pommery au sud d’Etreillers. Le
régiment commença ces « travaux » le 9 février. Le 10 février, la
destruction des cheminées d´Etreillers et de Douchy fut terminée. Le 12, on fit exploser
les caves souterraines de BEAUVOIS.
C´est ce même jour qu´on reçut l´ordre
de tout raser, pour faire perdre à l’ennemi tout moyen d´observation, de
progression et de couverture. Le 13 février on fit
exploser les caves des châteaux de DOUCHY et POMMERY déjà détruits. Le 14 février les
villages de FLUQUIERES, ATTILLY, VAUX, BEAUVOIS, HAPPENCOURT, BRAY-SAINT-CHRISTOPHE, GERMAINE
et FORESTE furent attribués à la
compagnie…On s´est mis à transformer systématiquement tout le pays en désert. Le 27 février, la compagnie
reçut l´ordre de préparer les routes et
les ponts pour être dynamités. Le 8 mars, le pont sur le
canal à DALLON et les écluses près de FONTAINES-LES-CLERCS furent détruits. On avait presque tout terminé
le 12 mars. Et le 16 mars on commença le repli sur la
ligne Siegfried. Pour
terminer, on fit sauter les ponts et les routes près de SERAUCOURT et CASTRES ainsi que les fontaines près de
FONTAINES-LES-CLERCS. La
population a été transportée, en majeure partie vers l’Est. Dans
une moindre mesure, une partie des habitants a été laissée à NOYON, HAM et NESLE, équipée de
vivres pour quelques jours. Pour
terminer, l’historique du régiment apporte la conclusion suivante : « La compagnie du génie s’est vouée à
cette tâche qui lui incombait avec un plaisir particulier. Ce fut une vie de
bonne aventure après la période énervante de la guerre de positions. Personne
n´a regretté la destruction. Lors de ce travail tous les soldats comprirent ce
que cela signifierait d´avoir l’ennemi dans son propre pays. Et la conscience
de n’être pour rien dans cette guerre imposée nous facilita beaucoup ce
travail ». Source : Das Posensche Pionier-Bataillon Nr 29 , par Hans Tröbst und Artur Leipold, Berlin, Verlag Tradition Wilhelm Kolk, 1932. Recherches effectuées par Gerd KRUMEICH.
PREPARATIFS DU REPLI AUX ALENTOURS DE CARTIGNY;
Informations extraites de l’historique du régiment allemand cité en bas de page :
Le 5 mars 1917, le régiment reçoit l’ordre de procéder aux
« mouvements Siegfried ». On crée un dépôt à Le Mesnil (Mesnil-Bruntel) où sont stockées les
munitions des premières lignes. La nuit du 13 au 14 mars, la neige tombe, l’ordre de reculer est donné. On
transporta tout en arrière, les ponts sont tous minés. Le 1er
bataillon du régiment se transporte de Beaumetz à la rive droite de la Somme.
Il a fallu garder cette position durant un moment. On détruit systématiquement
les premières lignes et les abris. … Chaque compagnie
laissa un officier et quelques hommes au-devant pour tromper l’ennemi. Malgré les villages en
flammes l’ennemi ne semble pas avoir pris note de notre retrait. Cela nous a créé un
frémissement que de marcher à travers les villages en flammes : CARTIGNY brûlé, on voit les flammes de
Péronne. On prend quartier à BEAUMETZ. Même chose à BERNES, où est posé le IIIe Bataillon. Le 17 mars on se retire
complètement, BEAUMETZ est détruit. Source : Das
Füsilier-Regiment Prinz Heinrich von Preußen ( Brandenburgisches) Nr. 35 im
Weltkriege, Oldenburg/Berlin 1929. Recherches effectuées par Gerd KRUMEICH.
ORGANISATION DU REPLI SUR PLUSIEURS ITINERAIRES.
Bref compte-rendu de lecture du
« Journal » authentique d’Ernst
Jünger Il écrit que les anglais
ont tenté des entreprises contre le secteur. Il se demande si cette nervosité
des anglais a à voir avec la retraite qui a commencé sur l’aile droite. Et il
pense que, pour en savoir plus, ils tentent de prendre des prisonniers. 9 mars :
On lui dit que la compagnie va être logée à DEVISE pour un moment et qu’après elle se transportera dans un
village près St. Quentin, au nom de Lehaucourt
vraisemblablement. « Notre retraite à travers un paysage totalement
détruit risque d’être très intéressant ». 11 mars : il
fait le récit de ce qu’il observe, dans les villages en cours de destruction, sur le chemin qui conduit sa compagnie
vers la ligne de front…comme une grandiose scène du carnaval de la
destruction ! 17 mars :
Il décrit, en substance, cette journée « historique » : On
traverse la Somme et on fait exploser les derniers ponts, puis la compagnie
marche jusqu’à Vermand en passant par Athies. On a tout juste
traversé la Somme quand les premières patrouillent anglaises apparaissent sur
l’autre rive. Partout à VERMAND, on
fait dynamiter des maisons ». 18 mars :
Il poursuit le récit de la manière suivante : Le bataillon se
transporte à LEHAUCOURT pour y
prendre quartier. Il note qu´on a tout ce qu´il faut dans les maisons, puisque
les habitants ont été évacués précipitamment et n’ont pu prendre avec eux que
très peu de choses. D’après les
notes de Gerd KRUMEICH, rédigées suite à ses recherches dans le
« Journal » authentique d´Ernst Jünger qui a été publié par Helmut
Kiesel 2010 (Ernst Jünger Kriegstagebuch 1914-1918, Stuttgart, Klett-Cotta
2010). “Ernst Jünger , Journal ad Alberich”. (Pour le
récit qui suite, le territoire
concerné est le même que pour le récit d’Ernst Jünger ci-dessus) Pour la période du 17 au 22 Mars 1917 l’historique du régiment allemand cité en
bas de page, nous indique ceci : „Il a fallu, dans un intérêt
strictement militaire, détruire devant la ligne Siegfried
un terrain d´une étendue de plusieurs kilomètres de manière à ce que l´ennemi ,
dans sa poussée qu´on attendait, ne trouve ni quartiers où se poser, ni moyens
de se cacher ». …Le 17 mars à 5 h du matin les
patrouilles d´officiers et la 10e compagnie se retirent sur la rive droite de
la Somme. Malgré le feu ennemi intense, on arrive, sans avoir eu de pertes, à ESTREES vers 10 h du matin et
après une courte pause on continue pour VERMAND,
où on prend quartier. Le Ier bataillon se loge vers PŒUILLY. Le 19mars
: à 4h30 du matin le 1er bataillon se loge à BELLENGLISE. Le IIe bataillon travaille pour l´amélioration de la
1ère position du régiment qui est située au sud-est de Bellenglise, sur les
deux bords de la route La Barague - St. Quentin.
Source : Das Infanterie-Regiment Hamburg (2.
Hanseatisches ) Nr. 76 im Weltkriege 1914/18, par Herbert v. Gydow,
Oldenburg-Berlin 1922 - Commandant
du régiment: Major v. Burstin ; Adjutant : Hauptmann v. Sydow Recherches
effectuées par Gerd KRUMEICH.
Informations
extraites de l’historique du régiment
d’infanterie allemand cité en bas de page :
La 12e compagnie prend
position au nord-est de DOINGT, la 11e compagnie va à COURCELLES, l´Etat-major du Régiment et la 10e
compagnie vont à CARTIGNY. Pour couvrir la retraite , on a laissé
une patrouille dans chacun des secteurs de compagnie . On réussit à tromper l’ennemi en faisant régulièrement feu depuis les quelques
fusils et la mitrailleuse qu´on avait gardé pour ces patrouilles. Dans
la nuit du 16 mars, l’ennemi (les alliés) réussit à s´infiltrer quand
même. On réussit à s´échapper face aux
attaques massives mais on ne peut transporter en arrière l´obusier de tranchée,
on le détruit avant de partir. On arrive sur la rive est de la Somme
et on fait exploser le pont César derrière nous. Le
17 mars au soir, tous les bataillons
du régiment ont pu se replier. Le
18 au matin, le IIIe bataillon
arrive à LEVERGIES (Ligne Siegfried /Hindenburg) en passant par BERNES. Le Ier bataillon s’est réuni sur
la route CARTIGNY-HANCOURT et part de là pour LEVERGIES
où on s´installe dans la Ferme Preselles. Le IIIe bataillon marche toute la nuit
et arrive le 19 au matin à VAUX-ANDIGNY et le IIe bataillon prend quartier à
Méricourt. On reste dans les quartiers jusqu’au 24 mars où on est tous transportés
par train vers HENIN-LIETARD, d´où on marche à pied jusqu’à
Harnes. C´est là qu´on est relevé par un autre régiment et le régiment se
retire à LENS, en quartier. Source : Nassauisches
Infanterie-Regiment Nr. 88 ( Erinnerungsblätter deutscher Regimenter, no. 10,
s.d.).
Recherches effectuées par Gerd KRUMEICH.
Informations
extraites de l’historique du régiment
d’infanterie allemand cité en bas de page : Pour préparer le repli, des commandos spéciaux sont envoyés à Saint-Quentin,
en vue de repérer le terrain et d’identifier le travail à effectuer par les
différentes compagnies. Le 14 mars,
on reçut les ordres précis pour la retraite. Le Ier et
le IIIe bataillon marchèrent, pendant la nuit à travers les villages en flammes : Morchain – Bethencourt – Villecort - Y – Matigny
jusqu´à ce
qu’on prenne quartier à Douilly, où
on arriva à l’aube. Le lendemain, deux
bataillons se sont rendus à Saint-Quentin et on laissa deux compagnies pour la
garde, à la sortie de SAINT-QUENTIN/direction HOLNON. Le 22 mars
elle fut engagée contre de virulentes attaques ennemies. Mais il a fallu céder
après un temps. Cette bataille fut mentionnée dans l’ordre du jour de la
division. A partir du 24 mars on prit poste vers SELENCY et FRANCILLY. On décida de
« nettoyer » Etreillers de l’ennemi. En fin de compte on a
réussi à enrayer l’attaque mais on a été obligé de se retirer dans la forêt de
SAVY où on résista à plusieurs attaques sur la ligne de chemin de fer entre la
gare d´HOLNON et la forêt. Il y eut encore
d´autres engagements mais l´ennemi (les alliés) ne s’aventura pas
au-delà de la ligne Francilly –Selency. On prit « quartier d´alarme »
à Saint-Quentin. On avait dû laisser à l’ennemi tous les obusiers et canons. On
voulut les récupérer, mais ce fut impossible, l’ennemi ayant tout transporté en
arrière déjà. Source : Infanterie
Regiment Kaiser Wilhelm (2. Großherzoglich-Hessisches) Nr. 116 , par Albert
Hiß, Berlin 1924 - La retraite vers la Ligne Siegfried. Recherches effectuées par Gerd KRUMEICH. |