L’architecte Pierre ANSART et Gérard ANSART, son jeune fils décorateur, préposés à l’ameublement de l’église
reconstruite
ont rappelé dans la ferronnerie, la boiserie, les vitraux, les
mosaïques…l’époque franque se rapportant à la vie de Sainte Radegonde.
A
l’entrée du chœur : on voit deux ambons en fer forgé dont on peut noter
la fonctionnalité au niveau du porte-livre « mobile ». (Élément
significatif des aspects fonctionnels de l’Art Déco).
Avec l’Art
Déco, il y a, tout en étant dans la modernité, une sorte de retour aux
sources. Dans les églises de la Reconstruction, « les références aux
pratiques des premières communautés chrétiennes sont perceptibles par
l’importance donnée ( dans certaines églises) aux chapelles baptismales
et par la du mobilier disparu des églises depuis longtemps comme les
ambons, moins imposants que la chaire à prêcher, mais aussi moins
coûteux à fabriquer ».
« L’ambon est donc : une tribune placée à
l’entrée du choeur (des églises chrétiennes) pour la lecture de
l’évangile et de l’épître ».
Sur ceux-ci figurent les symboles des 4 évangélistes :
. Le lion pour Saint-Marc,
. Le taureau pour Saint-Luc,
. L’aigle pour Saint-Jean,
. Et L’homme pour Saint-Matthieu.
Encadrés de fer forgé, leurs portraits sont constitués de mosaïques incrustées.
Les
fauteuils du célébrant et des enfants de choeur, en bois, figurent les
sièges de l’époque mérovingienne (nous dit l’abbé Studzinski) mais
Pierre ANSART, dans les mêmes périodes, dessina les mêmes pour les
églises de BERNES et AUCHONVILLERS. « Seul diffère à CARTIGNY le motif
du tissu tendu sur le dossier du fauteuil du célébrant, le chrisme a
été changé en aigle aux ailes étendues devant l’inscription latine : «
Et verbum caro factum est » (Et le verbe s’est fait chair), autrement
dit la parole de Dieu est annoncée parl’intermédiaire du clerc »
(Commentaire Expo 2014)
Et pourquoi l’aigle ? Peut-être en référence
à Saint-Jean qui, comme évangéliste est représenté par un aigle ?
(Jean, « celui que Jésus aimait », proche de la mère de Jésus…ou
l’Annonciation est peut-être ainsi rapportée dans l’évangile de St-Jean
?
Le
luminaire, dans une présentation « résolument moderne, évoque par
certains aspects une rusticité rappelant l’époque franque » de même que
le haut du luminaire rappelle la couronne de la Reine des Francs. Les
appliques, dans la nef, rappellent les torches franques.
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Quant
aux stalles en bois, elles sont d’une réelle simplicité. Elles sont
cependant agrémentées, sur leur ligne haute, d’une frise composée de
motifs décoratifs tout à la fois sobres et abstraits. Imaginons cet
espace sans l’autel « face au peuple » issu du Concile Vatican II, au
milieu des années 1960. Il y avait ici, en fer forgé, le banc de
communion (comme on dit ici à Cartigny), les stalles occupées par
d’autres prêtres présents ou des personnalités du village. Les
paroissiens étaient hors du choeur et s’y avançaient seulement pour la
communion. « Le maître-autel est en pierre blanche sertie de mosaïque.
Ainsi le support central de la table, en retrait, comporte une mosaïque
qui figure l’écusson, aux armoiries de la royauté : 3 fleurs de lys
d’or sur fond azur avec la devise au-dessus de l’écusson « GESTAE DEI »
et en-dessous « PER FRANCAS » : L’histoire de Dieu (écrite) par les
Francs ou « L’action de Dieu
passe par les Francs ».
Sur
les deux fûts de la table de l’autel, entre les chapiteaux et la base
figurent, en mosaïque, des feuilles de lierre (ou de liseron ?) qui
symbolisent : la fidélité, l’attachement.
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Les
deux panneaux du tabernacle en pierre blanche sont ornés, à
l’intérieur, de mosaïques qui figurent deux paons affrontés, déployant
leur ramage vers la porte du tabernacle (un peu comme un presse-livre)
en inclinant leurs têtes surmontées d’une aigrette, symbole de
l’immortalité ou de la vanité vaincue. A voir aussi sur ce vitrail : 2
colombes affrontées. Thème que l’on retrouve également, semble-t-il, à
l’église de Villers-Carbonnel…et à l’église de Moislains, on a deux
anges affrontés pareillement autour du tabernacle. Dans le Livret
d’expo de 2014, Pascale TOUZET, spécialiste de Pierre et Gérard ANSART,
indique que, dans leurs oeuvres, : « le thème des représentations
affrontées est récurrent. Les animaux se faisant face, sujet d’origine
orientale et fréquemment traité au Moyen Age, apparaissent surtout avec
les oiseaux (paons, colombes) dont l’artiste déploie le plumage avec
magnificence, notamment sur les retables de part et d’autre du
tabernacle ».
Sur la porte du tabernacle en mosaïque est représenté un calice surmonté
d’une hostie.
Au-dessus
de la porte du tabernacle est gravé dans la pierre blanche un chrisme
auquel font pendant, de chaque côté, la 1ère lettre de l’alphabet grec
« Alpha » et la dernière lettre « Oméga » qui signifient « Je suis le
commencement et la fin »
Les deux chandeliers à 3 branches en fer forgé sont fixés sur les deux panneaux latéraux du retable.
Les
4 tiges de la courtine, en retrait de l’autel, sont surmontées d’une
couronne royale d’où émerge une crosse abbatiale, l’ensemble en fer
forgé. Sur la tenture de gauche figure Radegonde et Saint-Médard avec
l’inscription
en latin : « Sponsa Dei » (Epouse de Dieu). La crosse abbatiale rappelle qu’elle a
été
abbesse d’un monastère pendant 35 ans. Sur la tenture de droite
figurent Clotaire 1er et Radegonde Reine des Francs » avec
l’inscription en latin « Regina Francorum ». Et les couronnes présentes
ici comme sur les bougeoirs ou les luminaires rappellent cette partie
de sa vie.
Le tout est surmonté d’une crois pattée en mosaïque telle qu’on la représentait à l’époque franque (depuis le IVème siècle).
En
haut de la croix, au-dessus de la tête du Christ, on distingue les
initiales « INRI » : Ce sont les initiales des mots latins « Iesus
Nazaremus Rex Iudacorum », c’est-à-dire « Jésus le Nazaréen Roi des
Juifs » que Pilate avait fait
inscrire sur la croix (Jean, ch. XIX, verset 20). Ces initiales figurent souvent sur les crucifix.
A chaque bras de croix est suspendu un médaillon représentant les lettres grecques Alpha et Omicron en mosaïques.
Pascale
Touzet nous dit que « les motifs décoratifs géométriques comme les
spirales, les écailles triangulaires, les pendentifs, les motifs
centrés ou encerclés, les traits ondulants sont omniprésents dans les
représentations des
œuvres, comme des rehauts du décor, et
essentiels au traitement décoratif des luminaires, chandeliers,
ameublement des églises. Les composantes d’un édifice s’unissent ainsi
dans un même style. »
Par ailleurs, « Les extraits de textes donnent du sens aux pièces de mobilier et sont des compléments aux motifs décoratifs. »
A
ce propos, même le porte-livre, présent sur l’autel, est de style Art
Déco et il est écrit dessus en latin : « Oremus » (Prions).
L’éclairage
du choeur à 3 pans aveugles provient des 6 fenêtres en berceau à
vitraux symboliques qui représentent respectivement,
Côté Nord :
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Le Pélican, qui était au Moyen Age un symbole de piété pour l’Eglise
chrétienne. On croyait qu’il perçait sa propre chair et nourrissait ses
petits de son sang. Ainsi le Pélican symbolise le sacrifice du Christ
qui verse son sang pour le salut du genre humain…S’il se trouve
au-dessus de ses oisillons, il est décrit comme « un pélican de piété
». (Wikipédia)
- - Le paon (vitrail soufflé par une tempête) rappelant peut-être les paons de l’autel ?
- L’Agneau
pascal…On peut voir sur chacun de ces vitraux, outre les spirales
toujours présentes, 4 cives disposées, peut-être, comme un rappel de la
croix.
Côté Sud, faisant face aux précédents :
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Face au Pélican, on a Le Lion, symbole de puissance ? ou en rappel de
Saint-Marc symbolisé par une tête de lion parmi les 4 évangélistes ?
- L’IXOYS
(mot grec) ou ICHTUS en latin (mot qui signifie « Poisson ») et dont
les lettres grecques prises séparément correspondant au monogramme du
Christ : « Iesous Christos Theou Uios Sôter » c’est-àdire: «
Jésus-Christ, fils de Dieu, Sauveur ». Ce mot entouré d’un cercle
blanc, semble flotter (marcher ?) sur l’eau représentée par la couleur
bleue et les lignes qui peuvent représenter les flots, eau dans
laquelle il nous semble distinguer, sous forme stylisée, un ou
plusieurs poissons. Le Poisson est le signe de reconnaissance des
premiers chrétiens. Il symbolise aussi l’assemblée des chrétiens,
c’est-àdire l’Eglise.
- Les deux colombes affrontées
perchées sur le rebord d’un calice (avec, peut-être, en fond une hostie
qui émerge par le dessus ?), qui symbolise l’Eucharistie, face à
l’Agneau pascal.
Le Beau-Dieu du portail
La
sculpture du Christ surplombant le porche principal de l’église de
Cartigny serait une réplique du « Beau-Dieu » au fronton de la
cathédral d’Amiens. Les ressemblances sont frappantes.